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Penser le(s) opinion(s) à l’époque moderne

Working Papers

Les textes présentés dans cette rubrique sont pour partie issus d’une journée d’étude organisée à Grenoble le 20 mars 2008 par Gilles Bertrand et Naïma Ghermani dans le cadre des activités du CRHIPA.

Les textes présentés dans cette rubrique sont pour partie issus d’une journée d’étude organisée à Grenoble le 20 mars 2008 par Gilles Bertrand et Naïma Ghermani dans le cadre des activités du CRHIPA. Celle-ci faisait écho à une autre journée grenobloise sur Propagande, iconographie et politique, XIIIe-XVIIe siècle, organisée par Giuliano Ferretti pour le MIFI (Master International Franco-Italien) le 7 novembre 2006. Elle a fourni l’occasion à des historiens travaillant sur différentes aires géographiques (France, Italie, Suisse, Allemagne) de réfléchir à un problème de grande actualité : ce n’est donc pas un hasard si un thème similaire fut retenu la même année par l’Association des historiens modernistes des Universités françaises lors de son colloque annuel, les 25 et 26 janvier 2008.

La rencontre grenobloise a notamment permis de discuter les thèses novatrices de l’ouvrage de Sandro Landi Naissance de l’opinion publique dans l’Italie moderne. Sagesse du peuple et savoir de gouvernement de Machiavel aux Lumières (Rennes, PUR, 2006). C’est dans ce débat que s’inscrit Jean Ehrard, qui a bien voulu nous remettre l’analyse qu’il a proposée dans une perspective d’histoire des idées le 6 février 2010 à Clermont-Ferrand, à l’occasion d’une rencontre informelle des dix-huitiémistes de l’Université Blaise Pascal sur la notion d’« opinion publique », à laquelle participaient aussi Philippe Bourdin (Centre de recherche  « Espaces et cultures ») et Jacques Carré (Université de Paris IV).

L’historiographie récente, à la suite des recherches de Jürgen Habermas, a tendu à inscrire la naissance de l’opinion publique dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’associant étroitement à l’émergence des Lumières. Ce phénomène, que l’on marie volontiers à la mise en place de pratiques républicaines et démocratiques, aurait fait apparaître une sphère publique, porteuse féconde de débats sur lesquels Sandro Landi, de l’Université de Bordeaux, et Edoardo Tortarolo, de l’Université du Piémont oriental (Italie), interviennent ici en les plaçant dans une perspective de longue durée (XVIe-XIXe siècle).

La journée d’étude grenobloise du 20 mars 2008 est revenue sur cette notion dont la fortune n’est plus à démontrer pour enquêter sur ses origines, souligner la diversité et la plasticité de ses formes et par là déconstruire quelques lieux communs qui lui sont indéfectiblement attachés. En interrogeant ce qui s’est passé au XVIe siècle, notamment en France et en Suisse à l’époque des guerres de Religion (Tatiana Baranova, de l’Université de Paris 4, et Olivier Christin, de l’Université de Lyon 2 et de l’EPHE) et sans oublier le XVIIe siècle (Christine Vicherd, Université de Grenoble 2), on peut repenser la datation et la définition de l’opinion, l’opposer ou la rapprocher d’autres concepts tels que celui de propagande.

Comment est invoquée dans les conflits notamment politico-religieux, par l’un ou l’autre camp, l’opinion commune, garante de la légitimité d’un combat ? Quelle est cette position « commune » : celle de l’homme du commun s’exprimant librement ou celle d’une minorité politique capable grâce à un niveau de culture plus élevé d’exercer son jugement pour le bien public ?

Penser l’opinion ou les opinions implique enfin de réfléchir sur les outils (presse, pamphlets, inscriptions, dédicaces, gravures…) qui permettent de construire le jeu des opinions dans des espaces variés au sein de l’Europe tout au long de l’époque moderne, de la ville à l’État, et sur la nature des instruments intellectuels qui en assurent la transmission et le partage (réservoirs de lieux, codes rhétoriques…). Ceux-ci se prêtent à une large gamme d’usages et d’appropriations, et s’appuient sur des personnages relais, grâce auxquels les opinions sont forgées, entendues et incorporées à la vie des communautés et des groupes.

On mesure l’importance de cette contribution des historiens modernistes au débat contemporain sur la construction et la manipulation des opinions ainsi que sur le destin de nos démocraties.

  • L’« opinione pubblica » est-elle la reine du monde? Le débat italien du XVIIIe siècle Edoardo TORTAROLO

    Edoardo TORTAROLO

    L’origine du syntagme accrocheur – pour reprendre Sandro Landi – opinione pubblica en italien au XVIIIe siècle ne fait aucun doute. La recherche de Sandro Landi l’a montré de façon tout à fait claire et convaincante. Mon rapport est une sorte de commentaire ou paratexte à son livre. Je me limiterai ici aux aspects de l’histoire de ce syntagme opinione pubblica qui servent à la compréhension du vocabulaire des Lumières italiennes, surtout d’un point de vue politique et quant à l’image de la société que les hommes des Lumières ont eue.

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  • Le statut de l'opinion dans le discours politique italien au XVIe siècle. Notes de travail

    Sandro LANDI

    Dans un article célèbre Pierre Bourdieu a écrit que "l'opinion publique n'existe pas" . Cette affirmation provocatrice devrait être prise au sérieux non seulement par les sociologues mais aussi par les historiens et notamment par les historiens modernistes. En effet, selon quelles conditions peut-on considérer l'opinion publique comme un objet historiographique à part entière?

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  • « Opinion(s) », « opinion publique » et quelques équivalents approximatifs. XVIIe-XVIIIe siècles (De Pascal à Chamfort)

    Jean EHRARD

    Dans l’historiographie des Lumières la question de l’opinion publique est aussi actuelle que récente. Lancé en Allemagne, et en allemand, par J. Habermas en 1962, le thème n’a vraiment rebondi en France qu’après la traduction française de son ouvrage pionnier en 1978 et il ne s’y est développé que dans les vingt dernières années.

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  • Autour d'une fiction: opinion et jugement sur les affaires publiques

    Tatiana DEBBAGGI BARANOVA

    Comme l’a souligné Sandro Landi, l’historien du livre et de la lecture, et, à plus forte raison, l’historien des textes polémiques ou diffamatoires, ne peut pas échapper à prendre position par rapport aux notions de l’opinion publique et de la propagande.

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